COVID-19 : un catalyseur de changement
Comme plusieurs personnes, l'arrivée de la Covid-19 en mars 2020 a été un catalyseur de changements. À l'aube de la cinquantaine, j'ai pris le risque de quitter mon emploi et fait un bref retour sur les bancs d'école afin d'ajouter une corde à mon arc professionnel. Occupée à plein temps par cette formation, le confinement obligatoire a presque été salutaire pour moi parce que j'ai pu faire mes cours dans le confort de ma maison, m'épargnant ainsi deux heures de transport quotidien.
Armée de ces nouvelles connaissances, j'étais en mode recherche d'emploi lorsqu'en mars 2021, j'ai reçu le diagnostic qui allait changer encore plus ma vie: j'étais atteinte d'un lymphome diffus à grandes cellules B (rebaptisé « Lymphome à grandes oreilles » par une de mes amies, aussi atteinte d'un cancer du sang).
À partir de ce jour, j'ai considéré la Covid-19 avec beaucoup plus de gravité. Est-ce que j'allais pouvoir être soignée rapidement malgré le délestage dans les hôpitaux? Est-ce que le simple fait d'aller à l'hôpital me mettrait en danger ?? Allais-je être capable de passer à travers mes journées de chimio toute seule, sans soutien, vu l'interdiction d’accompagnement ???
Oui, non et oui. Tout mon processus de traitement s'est beaucoup mieux déroulé qu'anticipé. Aucun délai, hôpital sécuritaire et séances de chimio solo pas si mal, finalement. C'était l'été, le niveau de contagion était bas et les vaccins étaient finalement arrivés. Ma cour est rapidement devenue mon royaume pour lire, dormir, me baigner et surtout, SOCIALISER !! J'habitais dorénavant à Laval-by-the-beach et tout allait plutôt bien dans le meilleur des mondes. Les nuages se sont pointé le nez à la fin de l'été lorsqu'au détour d'une journée de conférences virtuelles sur le lymphome (gracieuseté de l'association ELLyE, en France), j'ai pris conscience que j'étais loin d'être sortie du bois. En fait, à l'approche de l'automne, j'allais plutôt y entrer et y être enfermée pour l'hiver. Je m'explique... La Covid-19 s'étant répandue en Europe avant d'arriver ici, la recherche médicale était à ce moment plus avancée là-bas qu'ici. Durant cette journée j'ai donc appris que le Rituximab, présent dans mon protocole R-CHOP, rendait inefficace le vaccin contre la COVID-19 et ce, pendant les 12 mois suivant la dernière chimio. Le calcul a été rapide. Ayant reçu ma dernière dose de Rituximab en août 2021, j'allais devoir passer l'hiver enfermée chez moi, sans voir personne, puisqu'une cour et une piscine, quand il fait -20°C, c'est pas mal moins attrayant pour la famille et les amis. J'ai pris cette nouvelle comme un coup de pelle dans le front, presque autant affectée que par l'annonce du diagnostic lui-même. J'adore mon conjoint, mon
meilleur ami et complice de tous les jours, mais ne voir que lui pendant trois ou quatre mois?? Ouf! J'avoue avoir été sonnée pendant plusieurs jours, puis suis tombée en mode solution: on allait équiper notre terrasse de quelques chauffe-terrasse pour que les braves parmi nos amis et famille puissent nous rendre visite. Et puisque le confinement est revenu pour tous durant le temps des fêtes, je me suis sentie moins seule au monde et j'ai même décoré la maison.
Est-ce que mes proches m'ont trouvée intense? Tellement! Mais ils ont mieux compris lorsque je leur ai expliqué, résultats de recherches à l'appui, que mon risque de décès serait de 25% si j'attrapais le virus. Disons qu'il est difficile d'argumenter contre ça. N'empêche, il m'a souvent fallu rappeler les consignes, notamment à mon fils qui, n'habitant plus la maison, avait très très envie de bécoter son chat dans la maison lorsqu'il nous rendait visite. J'ai aussi eu à expliquer à quelques reprises à mon papa de 91 ans la raison pour laquelle je ne pouvais pas, par exemple, aller au resto avec lui. Mais dans l'ensemble, l'hiver a été bien moins pénible que je l'avais imaginé. Mon moral n'a pas été à son meilleur tous les jours mais je me suis gardée occupée et oui, des braves sont venus jaser avec nous sur la terrasse, à -15°C! Une grande preuve d'amour qui réchauffe le cœur.
Le printemps étant à nos portes, la vie à l'extérieur va rapidement reprendre. À tous ceux qui sont dans une situation similaire à la mienne, je vous souhaite de bien en profiter et d'en savourer chaque seconde. C'est ce que je compte faire jusqu'à la fin août, moment où, je l'espère, de nouvelles doses de vaccin pourront enfin me défendre contre ce satané virus!
France
Laval, QC